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Ciel pur
(ЧИСТОЕ НЕБО)

Film de fiction, U.R.S.S., 1961, de Grigori Tchoukhraï, en couleur, sonore.

Production : MOSFILM, U.R.S.S., 1961

Durée : 110 minutes.

Version originale : russe

Sous-titres : anglais, français

Résumé :

Au tout début de la guerre, Alexeï Astakhov, pilote d'essai plein d'avenir, tombe amoureux d'une jeune ouvrière, Sacha. Son avion est abattu par les Allemands et il est décoré de l'Ordre du Drapeau rouge à titre posthume. Mais en réalité, Astakhov a été pris vivant par les Nazis. Entretemps un enfant est né de leur rencontre. Lorsque Astakhov réapparaît, à la fin de la guerre, rentrant de captivité en Allemagne, il est tenu pour suspect du fait qu'il a été prisonnier de guerre. Lors d'une séance du comité du parti, les membres de cette assemblée, qui siègent sous une statue de Staline grandeur nature, lui refusent sa réintégration dans le parti au motif  que les "vrais communistes", faits prisonniers pendant la guerre, avaient tous été fusillés.  En proie au désespoir, Astakhov se met à boire et tente de se suicider. Ce n'est qu'après la mort de Staline qu'il obtient sa réhabilitation.

Ce film  a été considéré comme le manifeste quasi officiel du Dégel et de la déstalinisation, pour autant que "la condamnation de Staline est claire, métaphoriquement aussi quand des images poudovkiennes de blocs de glace descendant une rivière figurent le dégel" (Marcel Martin, voir infra, p. 27). Il convient de noter que Tchoukhraï reste néanmoins en-deçà de la réalité, puisque les rescapés soviétiques des camps nazis furent largement considérés comme des traîtres et envoyés au Goulag à leur retour en URSS ; ce qui n'est pas le cas d'Astakhov, qui souffre d'ostracisme, y compris de la part de certains de ses proches, et ne retrouve pas son ancienne profession, mais n'est pas menacé de camp.

Grigori Tchoukhraï (1921-2001) avait réalisé en 1956 (en couleur) un des premiers et  des plus beaux films du Dégel, Le Quarante-et-unième, imprégné des nouveaux canons esthétiques qu'impulsait la Nouvelle Vague russe. Puis en noir et blanc, en 1959,  La Ballade du soldat – soit deux films reconnus dans le monde entier et qui marquaient, avec d'autres (Quand passent les cigognes de Kalatozov, Le Destin d'un homme de Bondartchouk, etc...) l'ouverture de l'URSS après la mort de Staline et la renaissance du cinéma russe. C'était l'époque du premier Dégel. Ciel pur vient plus tard, en 1961 : c'est la deuxième phase du Dégel, puisqu'en octobre de la  même année, le XXIIe Congrès du parti communiste marque à nouveau l'avantage de Khrouchtchev après une phase de restalinisation. Ce film-là est un manifeste politique, bien plus qu'esthétique. Car, paradoxalement, ce film lourd, vraisemblablement réalisé à la hâte, plein d'emphase et de grandiloquence, avec des colorations assez grossières (Tchoukhraï est revenu à la couleur), une musique tonitruante à l'annonce de la mort de Staline, se situe dans le plus pur style du réalisme socialiste sur un plan esthétique (à l'exception de quelques scènes), ce qui semble antinomique par rapport à son message.

 

 
Orientations bibliographiques :

Marcel MARTIN, Le cinéma soviétique de Khrouchtchev à Gorbatchev, P, L'Age d'Homme, 1993, 223 p. ; Josephine WOLL, Real Images: Soviet Cinema and the Thaw, Londres, I. B. Tauris, 2000 ; Denise J. YOUNGBLOOD, Russian War Films. On the Cinema Front, 1914-2005, Lawrence (KS), University of Kansas Press, 319 p., 2007 (ch. 5 : "The Thaw, 1956-1966", p. 107-141) ; sur la période du Dégel et la détalinisation au cinéma, voir Martine GODET, La pellicule et les ciseaux. La censure dans le cinéma soviétique du Dégel à la perestroïka, Paris, CNRS Editions, 2010, 308 p. (ch. 1) ;

Notice créée le 23 Avril 2007. Dernière modification le 13 Juin 2012.

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