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Machenka
(МAШЕНКA)

Film de fiction, U.R.S.S., 1942, de Youli Raizman, en couleur, sonore.

Production : MOSFILM, U.R.S.S., 1942

Durée : 77 minutes.

Version originale : russe

Résumé :

Synopsis : L'action se déroule pendant la Seconde Guerre mondiale. Macha Stepanova travaille comme employée au télégraphe et suit des cours du soir pour devenir assistante médicale. Elle fait la connaissance d’Alexeï Soloviev, jeune chauffeur de taxi, bon et généreux mais instable. Elle l’aide à préparer son examen d’entrée à l’école technique. Mais l’attrait qu’éprouve Alexeï pour une amie de Macha va les séparer. Ils se rencontreront à nouveau quelques mois plus tard, dans la zone voisine du front. Macha accomplit héroïquement son devoir d’infirmière. Cela impressionne tant Alexeï qu’après sa guérison à l’hôpital, il retourne au front.

On trouvera ci-après la conclusion de la Direction de la Propagande et de l'Agitation du Comité Central du VKP(b) concernant le scénario de E.I. Gabrilovitch  :

"18 janvier 1941

Le studio Mosfilm procède au tournage d'un film d'après un scénario de E. Gabrilovitch intitulé 'Machenka'.

Machenka est une bonne jeune fille soviétique ordinaire, qui a par hasard fait la connaissance du chauffeur Aliocha et en est tombée follement amoureuse. Dans la conception de l'auteur, Aliocha est un être frivole qui n'est pas digne de l'amour de Machenka. Elle est plus profonde, plus sérieuse, a un caractère entier. Petit à petit, sous l'influence des rencontres avec Macha, Aliocha fait des progrès, s'améliore. L'amour désintéressé de la jeune fille suscite en retour chez lui un amour qui répond au sien.

L'idée du scénariste est intéressante, mais la réalisation du projet, tel que celui-ci est prévu dans le scénario, suscite des objections.

L'un des personnages principaux du film, Aliocha, qui se régénère sous l'influence de Macha – qui l'aime –, est représenté de telle sorte que toute jeune fille qui se respecte devrait le mépriser et non l'aimer. Aliocha se montre futile, s'entoure de gens médiocres, son caractère n'est pas encore trempé mais, malgré tout, ll doit bien avoir un certain charme, sinon l'amour que lui porte une jeune fille soviétique d'avant-garde ne pourrait susciter chez le spectateur qu'un sentiment de dépit. Ce spectateur pourrait légitimement s'indigner que Macha continue à aimer un homme qui offense sa dignité d'être humain par sa légèreté de conduite. Avec son caractère entier et volontaire, tel qu'il apparaît dans le scénario, Macha devrait résolument surmonter en elle le sentiment qu'elle éprouve à l'égard d'Aliocha, si réellement ce sentiment conduit à avilir et à humilier sa dignité. Mais l'auteur du scénario, en dépit du bon sens, fait en sorte qu'elle supporte cet outrage parce qu'il a absolument besoin que Macha rééduque Aliocha, noceur endurci. 

En représentant Aliocha comme un être indigne, l'auteur fait endurer un drame à Macha sans que ce soit nécessaire, il lui fait porter une croix bien lourde à cause de cet amour inexplicable pour ce garnement qui, de son propre aveu, ne vaut pas un clou.

L'enchaînement de l'action pose également problème. C'est par hasard que Macha fait la connaissance d'Aliocha, chauffeur de taxi qui la ramène chez elle. Le principe d'une rencontre fortuite qui bouleverse la vie d'un être humain est caractéristique du cinéma occidental dans lequel elle a un sens. La vie d'un être ordinaire – d'une ouvrière, d'une employée – s'écoule toujours d'une manière uniforme, jour après jour, ce sont toujours les mêmes gens qui l'entourent, sans ouverture possible. Et soudain, une rencontre fortuite la plonge dans un monde différent, nouveau, et lui apporte le bonheur. On aime beaucoup ça dans les films américains pour insuffler aux masses l'idée que quelque chose de semblable pourrait  aussi arriver à chacun : un fils de milionnaire va tomber amoureux d'une jeune fille toute simple, une actrice remarquable d'un gars du peuple, un héritage imprévu va tomber du ciel sur un type fauché, etc.

On ne comprend pas pourquoi il faudrait faire en sorte que des Soviétiques se rencontrent par le fait du  hasard. Aliocha se conduit envers Macha de manière insensible, vulgaire et même lâche. Il est tombé malade, elle a pris soin de lui, a dépensé tout son argent, a contracté des dettes. Il  a considéré tout ça comme un dû et n'a même pas remarqué ce qui sautait aux yeux des autres. Il a fini par comprendre, par apprécier les sentiments de Macha et il s'est rapproché d'elle. Ils se sont expliqués et le mariage n'était pas loin... Mais il  a suffi que Vera, jolie fille coquette, fasse son apparition pour qu'Aliocha tombe amoureux d'elle et laisse tomber Macha.

Il se conduit de manière cynique avec elle : il laisse ses copains,  profiteurs et  coureurs, alcoolisés  s'adresser de manière ambigüe et vulgaire avec sa fiancée.

Toute la conduite d'Aliocha n'éveille qu'hostilité à son égard et il sera très difficile au spectateur de concevoir l'amour du sacrifice qui pousse Macha vers cet homme indigne. Le sentiment de cette jeune fille suscite pitié, compassion,ce qui, inconditionnellement, fait du tort à un personnage par ailleurs intelligemment conçu".

Signature : F. Levin

В.И. ФОМИН (сост.), Кино на войне. Документы и свидетельства, М, Материк, 2005, 941 с.  [document n° 153 : p. 347-348],  source : RGASPI,  fonds n° 17,  inventaire n° 125, affaire n° 71, p. 32-34.

 

[mauvaise copie/fin coupée] 

Orientations bibliographiques :  В.И. ФОМИН (сост.), Кино на войне. Документы и свидетельства, М, Материк, 2005, 941 с.; Peter KENEZ, “Films of the Second World War", The Red Screen. Politics, Society, Art in Soviet Cinema, in Anna Lawton éd., Londres-New York, Routledge, 1992, p. 148-171 ; Denise J. Youngblood, Russian War Films. On the Cinema Front, 1914-2005, Lawrence (KS), University of Kansas Press, 319 p., 2007 (ch. 3, "The Great Patriotic War, 1941-1945, p. 55-81) ;

Notice créée le 23 Avril 2007. Dernière modification le 12 Juin 2012.

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