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Parmi les pierres grises
(СРЕДИ СЕРЫХ КAМНЕЙ)

Film de fiction, U.R.S.S., 1983, de Kira Mouratova/Muratova, Ivan Sidorov, en couleur, sonore.

Production : STUDIO D’ODESSA, U.R.S.S., 1983

Durée : 88 minutes.

Version originale : russe

Résumé :

Il s’agit de l'adaptation d’une œuvre de Vladimir Korolenko, En mauvaise compagnie (1885), que Mouratova fusionne avec une autre du même auteur, intitulée Les enfants du sous-sol. L’action se situe avant la Révolution. Mouratova met en scène l’histoire d’un jeune garçon, orphelin de mère, qui vit avec son père, ancien juge et veuf inconsolable. Désœuvré et fuyant sa maison en deuil, le gamin traîne et rencontre d’autres enfants plus ou moins abandonnés, ainsi que des « clochards intellos »1 qui habitent dans des ruines. Privés de leur statut social ou ayant délibérément renoncé à celui-ci, ces indigents (niščij) au cœur noble ont rompu avec leur passé et vivent dans un monde à part. La plupart de ces marginaux ont un comportement incompréhensible et tiennent un discours incohérent fait de répétitions compulsives. Mouratova dresse le tableau hallucinant, en couleurs, d’un cimetière abandonné avec des croix de pierre blanche dressées dans un jardin d’éden aux arbres noueux, d’une église en ruine fissurée de toutes parts, d’une grotte où errent des personnages fantomatiques éclairés par la lumière d’un feu violent. Marginalité poussée à l’extrême ? Évocation d’un au-delà ? Familiarité fantasmée avec le monde des morts ? – toutes les interprétations sont possibles pour ce film qui échappe à toute classification. On prend conscience, avec Parmi les pierres grises, qu’au-delà d’une composante de son œuvre, la marginalité fait partie intégrante de la personnalité de Mouratova. Le film sera mutilé à tel point par la censure cinématographique (des morceaux de négatif étant détruits sans possibilité de récupération) que la réalisatrice retirera son nom du générique.

1) Selon la formule de Lubomir Hosejko, Histoire du cinéma ukrainien, Die, Editions A DIE, 2001 445 p., p. 308.

Orientations bibliographiques :

D. POPOV, “Bog umer”, Iskusstvo kino, 3, 1990, pp. 37-41 ; J.-P. FARGIER, “Viva Muratova”, Art Press (cinéma), n° 159, juin 1991, pp. 54-56 ; J. TAUBMAN, “The cinema of Kira Muratova", The Russian Review, 52, juillet 1993, p. 367-381 ; A. PLAKHOV, “Kira Muratova", Vsego 33: Zvezdy mirovoy kinorežissury, Vinnitsa, Akvilon, 1999, p. 201-212 ; G. ROBERTS, “The meaning of death: Kira Muratova's cinema of the absurd", in B. REUMERS (dir), Russia on reels: the Russian idea of post-soviet cinema, Londres, I.B. Tauris, 1999, p. 144-160 ; Lubomir HOSEJKO, Histoire du cinéma ukrainien, Die, Éd. A DIE, 2001, 445 p. ; Jane TAUBMAN, Kira Muratova, Londres, I.B. Taurish publishers, 2004, 168 p. ; Nancy CONDEE, The Imperial Trace. Recent Russian Cinema, Oxford-Londres, Oxford UP, 2009, 352 p. (ch. 4 : "Kira Muratova: The Zoological Imperium", p. 115-140) ;  Eugénie ZVONKINE, « Les états de la dissonance dans l'oeuvre cinématographique de Kira Mouratova», thèse, Paris 8, 2009 ;  Martine GODET, La pellicule et les ciseaux. La censure dans le cinéma soviétique du Dégel à la perestroïka, P, CNRS Editions, 2010, 308 p. (thèse EHESS, Paris, sous la direction de Marc Ferro, 2000) ; 

Notice créée le 23 Avril 2007. Dernière modification le 14 Février 2012.

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