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Mikhaïl Gorbatchev — Simples confidences

Film documentaire, France, 2011, de Gulya Mirzoeva, en couleur, sonore.

Production : Mille et Une. Films, ARTE France, France, 2011

Durée : 44 minutes.

Version originale : russe

Doublage : français

Résumé :

Ce film a été réalisé par Gulya Mirzoeva, documentariste d'origine tadjike vivant en France depuis 1992.

Le documentaire s'ouvre sur l'exposition qui a été consacrée à Mikhaïl Gorbatchev en décembre 2010 par la Fondation Gorbatchev à Moscou. Son fil conducteur est une interview de l'ex-Premier Secrétaire du P.C.U.S., qui s'exprime librement.

Gorbatchev commence par évoquer sa jeunesse de vrai communiste. Né en 1931. Mère ukrainienne, père russe issu d'une famille de colons venus s'installer dans le village de Privolnoe, dans la région de Stavropol (plus précisément dans les steppes de Salsk près de Rostov-sur-le-Don), suite à un "déplacement planifié" de colons. Grand-père paysan, chargé de mettre en œuvre la collectivisation, arrêté fin 1938-début 1939 pour trotskysme, quatorze mois de prison, torturé, puis libéré suite au réexamen de son cas. Il s'agit donc d'une famille de paysans : le jeune Mikhaïl  conduit des moissonneuses-batteuses à 15 ans.

Il est accepté à l'Université à Moscou (faculté de droit) sans examen, à cause des ses origines  paysannes (et ouvrières), et de ses convictions communistes : il est entré au P.C.U.S. en 1950, est secrétaire du Komsomol à Privolnoe. De très belles images d'archives du Moscou des années 1950  défilent à l'écran. Gorbatchev passe donc cinq ans à l'université à Moscou, est en même temps activiste du Komsomol ; il est animé d'une grande ambition.

On passe directement au 11 mars 1985, jour du décès de Konstantin Tchernenko. Gorbatchev est conscient que son heure a sonné, mais Grichine, Gromyko et d'autres sont également sur les rangs pour le poste vacant de Premier Secrétaire du parti : "De nombreux signes montraient que la société soviétique voulait Gorbatchev" – dit-il, ajoutant qu'il était parfaitement au fait de la situation très grave dans laquelle se trouvait l'URSS et conscient que des réformes étaient indispensables. Evocation au passage de la chanson du chanteur de rock Viktor Tsoï,  emblème de la jeunesse soviétique de l'époque, qui martelait : "Nous voulons des changements". Gorbatchev réussit à convaincre Gromyko que c'est lui, le mieux à même de mener à bien ces réformes et obtient son soutien : il devient donc Premier Secrétaire en 1985 (insistance sur le fait qu'il a reçu le pouvoir légalement).

Evocation, dense et brève, de son épouse, Raïssa [Titarenko] (1932-1999), originaire de l'Oural, rencontrée en 1950.

Gorbatchev ne traite pas de la période où il est au pouvoir et effectue les dites réformes, ni des changements survenus en URSS entre 1986 et 1990, pour en arriver directement à la date du 1er mai 1990, où il est hué sur la Place Rouge par une foule qui exige sa démission. Son analyse est que la nomenklatura aurait créé sciemment des problèmes pour le discréditer et montrer que la démocratie ne pouvait pas fonctionner en URSS, que l'on n'arriverait pas à reconstruire le pays. "Au début, je ne voulais pas casser le système, mais j'ai fini par comprendre qu'il fallait le réformer" – ajoute-t-il. La nomenklatura, "qui ne doit son poste ni aux élections ni à la démocratie, mais aux décisions  des supérieurs", aurait compris que cette période était en train de disparaître. Elle se serait donc organisée contre Gorbatchev en trouvant des accords avec Boris Eltsine. Ce dernier est traité de "lâche" à plusieurs reprises. 

Evocation détaillée de la période du putsch d'août 1991 : Gorbatchev reconnaît qu'il n'aurait pas dû partir en vacances dans la première quinzaine d'août mais qu'il était épuisé et  devait reprendre des forces, d'autant que le 20 août, devait être signé le "Traité de l'Union". Images du putsch dans le journal télévisé "Vremia" le 20 août, au cours duquel il est annoncé que pour problèmes de santé, Gorbatchev ne pouvait plus assurer ses fonctions de président de l'URSS. Sans surprise, celui-ci attribue la responsabilité du putsch à Eltsine, le rôle de ce dernier apparaissant comme évident puisque les putschistes lui ont proposé la présidence de l'URSS (il était déjà président de la R.S.F.S.R. depuis juin 1991), ainsi qu'à la nomenklatura. Dans un document video qu'il a enregistré le 20 août 1991 pour s'adresser au peuple (mais qui n'a pas été diffusé à la télévision soviétique), Gorbatchev prévenait que "les actes des putschistes [pouvaient] mener jusqu'à la guerre civile". "Pour virer Gorbatchev du Kremlin, ils ont sacrifié le pays" – ajoute-t-il dans ce documentaire. Le coup d'Etat fomenté par Guennadi Ianaïev avorte finalement, comme on le sait, mais Eltsine en sort néanmoins gagnant. S'il s'était maintenu au pouvoir envers et contre tout, on lui aurait reproché de provoquer une guerre civile – conclut Gorbatchev, qui évoque au passage le lâchage de l'Occident, en particulier celui de François Mitterrand. Il quittera la direction du PCUS et la présidence de l'URSS le 24 août 1991.

Ce film, où Mikhaïl Gorbatchev apparaît comme un homme vieilli et amer, ressemble à une autodéfense de celui qui reste pour l'Occident l'homme providentiel de la perestroïka.

 

 

Orientations bibliographiques : Virginie COULLOUDON, Génération Gorbatchev, P, Lattès, 1988 ; Mikhaïl GORBATCHEV, Perestroïka, P, J'ai lu, 1989 ; Basile KERBLAY, La Russie de Gorbatchev, Lyon, La Manufacture, 1989 ; Marc FERRO, Les origines de la perestroïka, P, Ramsay, 1989 ; Françoise THOM, Le moment Gorbatchev, P, Hachette, 1989 ; P. LOROT, Histoire de la perestroïka, P., PUF, Que sais-je ?, 1993 ; Boris ELTSINE, Sur le fil du rasoir, P, Albin Michel, 1994 ; Mikhaïl GORBATCHEV, Mémoires : une vie et des réformes, P, Ed. du Rocher, 1997 ; Éric BACHEBER, L'Afghanistan en guerre. La fin du grand jeu soviétique, Lyon, Presses Universitaires de Lyon, 1998 ; Boris ELTSINE, Mémoires, P, Flammarion, 2000 ; O. ERMAKOV, Reals Afghans, P, Albin Michel, 2000 ; Archie BROWN, The Gorbatchev Factor, Oxford, Oxford UP, 1996, 406 p. ; Andreï GRATCHEV, Le mystère Gorbatchev : la terre et le destin, P, Editions du Rocher, 2001, 377 p. ; Archie BROWN, Seven Years that Changed the World. Perestroïka in Perspective, Oxford UP, 2007, 350 p. ; Helmut ALTRICHTER, Russland 1989: Der Untergang des sowjetischen Imperiums, Münich, C.H. Beck, 2009, 448 p. ;

Notice créée le 8 Février 2012. Dernière modification le 31 Juillet 2012.

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