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Nouvelle Moscou (La)
(НОВАЯ МОСКВА)

Film de fiction, U.R.S.S., 1938, de Alexandre Medvedkine, en noir et blanc, sonore.

Production : MOSFILM, U.R.S.S., 1938

Version originale : russe

Sous-titres : anglais

Résumé :

Comédie excentrique sur le voyage à Moscou d'un jeune ingénieur en électricité, Aliocha, qui se rend dans la capitale pour présenter son projet architectural d'une nouvelle Moscou. "Située au cœur de l'utopie stalinienne, Moscou apparaît comme un contrée féérique". [...] C'est à Moscou que les personnages vont [...] recevoir les prix qui récompensent leurs exploits" (cf. Richard Taylor, voir infra, p. 92). Dans le train qui emporte Aliocha, les vues du paysage sibérien sont réduites au strict minimum, de même que celles du chantier de Vypinsk où il travaille, qui se trouve à 3 000 km à l'est de la capitale. Toute l'action est focalisée sur Moscou : par trois fois, dans le film, Alëcha interprètera cette même chanson – "Ja vižu moju rodnuju stolicu" [Je vois ma capitale natale]. L'utilisation de l'adjectif rodnoj, alors qu' Aliocha n'est nullement né à Moscou, indique que l'ensemble des Soviétiques  peuvent, ici par la biais du cinéma, se réapproprier affectivement la capitale (cf. Emma Widdis, voir infra, p. 138). Par ailleurs, Medvedkine, dans la première version du scénario, utilise l'adjectif "rossijskij" (et non russkij) : la réémergence de ce terme (cf. Emma Widdis) serait le signe d'un retour à la notion d'empire, impliquant un rejet du concept de révolution internationale et d'Internationale ouvrière, et l'introduction de celui de "socialisme dans un seul pays" – soit l'apogée du stalinisme, ce qui est confirmé par la mise sur le même plan des deux profils de Lénine et de Staline le soir du carnaval.

L'intrigue est construite autour des péripéties d'un triangle amoureux : celui que composent Alëcha Konopliannikov, Zoïa Novikova (que le jeune électricien rencontre dans le train pour Moscou), et l'artiste Fedia Utin. Le film serait une anticipation du film d'Ivan Pyriev La Porchère et le berger (1941).

Le clou de l'intrigue est la séance de projection au cours de laquelle les jeunes architectes révèlent leurs projets d'urbanisme (incluant le projet de Palais des Soviets, à l'emplacement de la cathédrale du Christ-Sauveur, projet qui ne sera jamais réalisé). Mais la maquette électrifiée, devenue folle et échappant à ses concepteurs, provoque un retour en arrière à l'ancienne Moscou : toutes les églises dynamitées par Staline ressurgissent, notamment la cathédrale du Christ-Sauveur (démolie en 1931) . On reste stupéfait devant l'audace dont cette scène témoigne, alors que que le film est par ailleurs une anthologie de propagande stalinienne. La Nouvelle Moscou n'est jamais sorti en salles et a été censuré en raison des images de la démolition de la cathédrale du Christ-Sauveur.

Texte des chansons : M. Isakovski.  

Orientations bibliographiques :

Sur le thème de la reconstruction de Moscou : Revue SSSR na stroike [L'URSS en construction]  ; Album Moskva rekonstriruetsja: Al'bom diagramm, toposkhem i fotografii po rekonstrukcii Moskvy [Moscou se reconstruit : album des diagrammes, toposchèmes et photographies de la reconstruction de Moscou], texte de Viktor Chklovski, dessins d'Alexandre Rodtchenko et Varvara Stepanova, 1937 ; Anatole KOPP, L’Architecture de la période stalinienne, Grenoble, Presses universitaires de Grenoble – École nationale supérieure des beaux-arts, 1978 ( rééd.1985), (préface :  Charles Bettelheim), 416 p.; Elisabeth ESSAIAN, "Le plan général de reconstruction de Moscou de 1935. La ville, l'architecte et le politique. Héritages culturels et pragmatisme économique", Thèse de doctorat en architecture, Université Paris VII - Vincennes - Saint-Denis, 2006 (à paraître aux Editions Parenthèses) ;

Sur le film : Richard TAYLOR, "La comédie musicale stalinienne : quelques propositions", in Natacha Laurent, éd., Le cinéma stalinien. Questions d'histoire, Toulouse, Presses universitaires du Mirail - La Cinémathèque de Toulouse, 2003, p. 83-94 ; Emma WIDDIS, Visions of a New Land. Soviet Films from the Revolution to the Second World War, New Haven-Londres, Yale UP, 2003, 258 p. (ch. 5 : "Travelling", p. 120-141).

Notice créée le 12 Janvier 2012. Dernière modification le 18 Janvier 2012.

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