Extrait de :  Marcel OMS, "Alexandre Dovjenko", Premier Plan, avril 1968, 130 p. (p. 14-15) :

[Peu après son arrivée à Odessa en juin 1926], "Dovjenko réalise son premier essai de mise en scène sur un de  ses propres scénarios écrit en trois jours : Le Fruit de l'Amour. C'est une courte comédie de 800 mètres où un garçon coiffeur, Kolbassuk, se trouve encombré d'un bébé (fruit de l'amour) dont il ne parvient pas à se débarrasser. Les prises de vues se sont déroulées dans les rues d'Odessa la plupart du temps.'Visiblement inspiré par Mack Sennett, ce film sans grand intérêt n'annonce en rien les films ultérieurs de Dovjenko', estime Georges Sadoul. C'est vite dit.

D'une part, ce film répond évidemment à des conventions schématiques (rehaussées – il est vrai – par les irrévérences de l' 'excentrisme') ; d'autre part il nous éclaire sur les dispositions d'esprit de Dovjenko livré à sa première expérience créatrice.

Ce qui frappe d'abord c'est un magistral culot.  En effet, le film est d'une totale libertré de ton et d'un absolu irrespect. L'insolence tranquille avec laquelle Dovjenko se lance dans le cinéma ne se démentira plus, quelles que soient les formes qu'elle prendra par la suite. Sous les apparences conformistes du scénario-prétexte, Dovjenko s'est abandonné à une démystification de la paternité.

Le bébé trimbalé, vendu, empaqueté, est toujours vu comme un objet encombrant dont la disparition est à mainte reprise froidement envisagée.

Mais le film est assez terne, assez traînard ; pauvre en gags, et n'eut d'ailleurs pas de carrière en U.R.S.S. à sa sortie.

'Je n'avais qu'un seul but : devenir réalisateur de films à sujets différents : comédies et comiques. Et, par ironie des choses, je n'écrivis que des épopées' (Alexandre Dovjenko, Ma vie)".