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Lac du diable (Le)
(Чёртово озеро)

Film documentaire, Russie, 1993, de Andreï Golovnev, en couleur, sonore.

Réalisation : Andreï Golovnev Image : Andreï Golovnev Montage : Valeri Zlygostev

Production : STUDIO DU BUREAU ETHNOGRAPHIQUE (EKATERINBOURG), Russie, 1993

Durée : 24 minutes.

Version originale : russe

Sous-titres : français

Résumé :

Andreï Golovnev, anthropologue attaché à l'Institut d'Histoire et d'Archéologie d'Ekaterinbourg, fondateur et directeur du "Bureau ethnographique" (Ekaterinburg), a dirigé de nombreuses expéditions anthropologiques et archéologiques dans le Grand Nord sibérien. Ses travaux sont principalement consacrés à l’étude du peuple nenets de la péninsule de Yamal au nord-ouest de la Sibérie, qui adopte un mode de vie semi-nomade fondé sur l’élevage du renne. L. A. Golovnev a également réalisé de nombreux films ethnographiques.

Ce documentaire, intitulé Le Lac du diable, porte sur un peuple voisin des Nenets, les Selkoups, qui vivent dans la forêt avec les ours. Il traite du culte des morts chez les Selkoups, qui vivent aux environs du lac de Lozel'to, le lac du Diable, où les dieux, mi-homme mi-ours, ont leur habitation.

Commentaire qui accompagne le film [traduction : Hélène Fara, sous-titrage : Serge Blerald] :

" Voilà Selanti, l'un des derniers Selkoups  qui habite  encore près  du Lac du Diable. Il a soixante ans passé.

On raconte que ce lac est la fenêtre de la  maison de la Femme en noir, la Vieille de la Terre.

De la fenêtre de sa maison, elle voit toute la terre des Selkoups.

Elle surveille tout ce qui s'y passe.

        

Au campement de Selanti, la vie suit son cours.

L'an dernier, son fils aîné s'est noyé et sa sœur est morte.

Il les a enterrés au cimetière du clan où il y a son arrière-grand-père, son grand-père, son père.

Sur chaque tombe, il y a une croix, avec des mains, des doigts.

Plus l'homme est grand de son vivant, plus on lui donne de croix.

Non loin de la tombe, il y a leurs affaires, dont les esprits partiront  avec l'âme du  maître  au pays des morts.

Sept jours après la mort, l'âme, el'sad, erre dans les lieux  habités, puis elle se cache souvent, puis  elle  passe dans un ours.

        

Le grand-père de Selanti était chaman.

 Selanti garde ses affaires - le tambour et les flèches sacrées,

 dans l'arbre des esprits, Kocel'po.

 Il vient ici de temps en temps, pour voir ses reliques et se souvenir de  lui. Son âme doit errer quelque part, pas loin.

 

Les hommes ressemblent aux ours et les ours aux hommes.

On dit que la Femme noire, la Vieille de la Terre, est à moitié ourse.

 

Aujourd'hui le vieux Selanti part en barque avec son fils Goga et 

le vieux Nikita. Ils  vont sur l'île de la Vieille de la Terre.

Quand tu vas en barque sur le lac du Diable, on dirait qu'il y a sous l'eau, une créature, c'est  Kamichka, le serpent à deux queues.      

 

Le soir, de l'île sacrée, on entend des pleurs, des aboiements, des bruits de chasse.

Mais ici, il vaut mieux  ne pas chasser, ni pêcher.

 

Tout ce qui est dans le lac du Diable appartient à la Vieille de la Terre.

Selanti lui a apporté des cadeaux, un brochet fumé et un peu de vodka.

- Que la Vieille sache qu'on la vénère, que l'on se souvient d'elle,

 là-bas au campement.

- Qu'elle arrête ces morts successives!

- Qu'elle apaise les relations entre les  hommes et les ours.

 

L'année dernière, les ours ont tué  15 rennes, à deux pas du campement. Cela signifie que quelque chose ne va pas.

Les ours n'embêtent pas les hommes  pour rien.

 

Selanti vit selon les coutumes de ses ancêtres.

Il pose des pièges dans l'eau et va voir  tous les jours s'ils fonctionnent.

Le vieux a plus confiance dans les pièges que dans les armes.     Mais, ses fils, eux, veulent  des moteurs, des armes de tir.

Ils veulent aller vite.

 

Voilà, c'est ici que les ours ont attrapé les rennes. Il y avait  le bruit des moteurs et des tirs. Mais l'ours n'a pas peur du bruit des hommes. Il n'a peur que des pièges silencieux.  Et si tu parles de lui, il écoute toujours, et parfois il s'approche près du campement pour voir comment ça va.

 

Mais aujourd'hui, Selanti monte en haut de l'île sacrée, à la maison de la Femme noire, qui fait tourner la vie. On dit que celui qui monte facilement en haut de l'île  vivra longtemps.

- Vis éternellement, la Vieille de la Terre, et, tant que nous sommes vivants, nous viendrons te voir et t'apporter  à manger. "

[Film réalisé avec la participation de la Fondation Mac Arthur, USA].  

 

 

 

Orientations bibliographiques : Андрей Головнёв, Говорящие культуры: традиции самодийцев и угров. Екатеринбург: УрО РАН, 1995. 607 с. ; Andrei V. GOLOVNEV, Gail OSHERENKO, Siberian Survival. The Nenets and their Story, Ithaca-Londres, Cornell UP, 1999, 176 p. ; Андрей Головнёв, Кочевники тундры: ненцы и их фольклор. Екатеринбург: УрО Ран, 2004. — 344 с. ; Андрей Головнёв, Дом на холме. Песни. Екатеринбург, 1997. 251 с. ; Андрей Головнёв, Антропология движения. Екатеринбург, 2009. 497 с.

Notice créée le 5 Octobre 2011. Dernière modification le 4 Juillet 2012.

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